mercredi 5 novembre 2008

Le retour en mer!

Trois années que je n’avais pas navigué… Je me suis finalement laissée convaincre, par mon future boss en mal de chef, d’aller travailler sur un charmant petit navire de recherche.

JOUR 1

La mission commence par une réunion : les «clients» affectueusement surnommés «Planctons» par moi-même (un rappel nostalgique de mon époque sur le Pétrel V), ainsi que tout l’équipage font des mises au point de sécurité. Fort bien.

Quant à moi, la Machine m’attend ! Après la rencontre, je fais le tour de la salle des machines où le chef sortant (on se croirait en élections !) m’explique dans un français approximatif qu’il a «fait la propreté». Finalement rien à voir avec les élections…

Directement arrivée de France, encore sur le décalage horaire, le lendemain je me réveille à 04h. Nous sommes toujours à quai, sur le courant de terre, donc pas un son sur le navire. Discrètement, toute la nuit j’ai évité le «flushage» de ma bécosse pour ne pas réveiller mes voisins de cabine.

Mais là, trop c’est trop. Je pèse sur le piton.

Rien.

Ah m…

Bon, je vais voir sur la bécosse commune. Même chose. Oh oh, le problème est généralisé. Cherchons les pompes d’eau sanitaire, vite, avant que les Planctons ne se réveillent. La veille, lors de la visite de la salle des machines, je me suis familiarisée avec les choses nobles : les moteurs principaux, les génératrices, l’équipement d’urgence, l’appareil à gouverner, etc.

Je trouve les pompes d’eau potable mais pas de sanitaires. Rien à proximité, j’ai beau tourner en rond dans la salle des machines, je ne trouve pas. Ailleurs, à l'autre bout du navire, dans le creux où se trouvent les machines à laver, il y a une petite écoutille indiquée «sewage».

En désespoir de cause, je vais voir. Dès l’ouverture de l’écoutille, un fumet me confirme mon intuition. Je prends mon courage à deux mains et je descends. Il s’agit d’une grande salle avec des pompes (tiens, tiens) et des réservoirs dont l’utilité se devine à vue de nez.

Problème localisé, mais loin d’être solutionné : Les pompes qui envoient de l’eau dans les bécosses fonctionnent bien mais LA pompe (LA pompe, car il n’y en a qu’une) permettant de créer le vide qui aspire le contenu des bécosses ne fonctionne plus.

Il s’agit d’un problème de moteur électrique : nous devrons le faire rebobiner.

Chance, le boss est encore à bord. Dès que tout le monde se réveille, c’est le branle-bas de combat : appel à un centre de dépannage électrique, qui viendra chercher le moteur. MAIS, pour retirer le moteur, il faut aussi retirer la pompe. Le robinet d’isolation de la pompe étant soudé dans la rouille en position ouverte, nous devons vider le réservoir d’eau usées (la tank à marde pour les intimes).

Pas question de pomper ça dehors, encore moins dans le port de Québec, ce serait un peu mal vu, surtout pour le 400e anniversaire ! Appel à un centre de pompage d’eaux usées, qui nous envoie un camion citerne. Et pendant ce temps, les besoins se font pressants. Nouvel appel à un centre de location de bécosses chimiques qui viendra livrer deux belles bécosses en plastique bleu sur le quai à côté du navire.

Avec nos deux bécosses chimiques sur le quai, on se croirait sur les plaines d’Abraham le jour de la Saint-Jean Baptiste!

Une envie de pipi en pleine nuit ? Il suffit de galoper dans les corridors, se retrouver sur le pont, monter au pont supérieur où se trouve le gangway, descendre le gangway à la Tarzan parce que la marée est haute et le gangway presque à la verticale…

Enfin, la pompe des bécosse arrive, est installée et la vie reprend son cours normal. Les Planctons finissent leur préparation, et nous partons à l’Aventure!!!

Jour 8 : La marde repogne!!!

Nous sommes en mer, à tourner en rond doucement dans la baie des Chaleurs pendant le repos des Planctons quand, juste avant mon quart de minuit, je m’aperçois que la pompe a encore sauté. Rapide concertation avec le capitaine, puis on se rend à Chandler. Nous sommes au quai à 03h.

Nous connaissons la routine : le camion-suceur pour vider le réservoir, les bécosses chimiques pour… bin, pour ça, oui, et une entreprise de rebobinage de moteur électrique. Le boss, alerté, vient en personne chercher la pompe pour aller la porter à qui de droit. On n’est jamais trop prudent. Et la faire bobiner en 600V et non en 440V, ça aiderait peut-être…

Vers 09h tout est en place, les bécosses chimiques, arrivées de Gaspé, sont en place sur le pont et bien attachées. On retourne en mer. Tous les gags et jeux de mots utilisés pendant la journée 1 recommencent. On ne s’en lasse pas.

Quand on croise un membre d’équipage avec son manteau sur le dos, on ne lui demande plus «Tu as froid?» mais bien «Tu vas aux bécosses ?»

On retourne le surlendemain à Chandler, il manque encore un morceau à l’équipement des Planctons. On en profitera pour ramasser notre pompe dont le moteur a été rebobiné correctement, paraît-il. Le boss en personne (encore lui) est allé le chercher à l’autobus de Rimouski et nous l’amènera en auto, bravant la tempête de neige.

Aussitôt arrivé, à 02h, on se met au boulot (applaudissons en passant le boss et le capitaine, qui ont mis la main à la pâte, si je peux m'exprimer ainsi) et enfin, les bécosses fonctionnent et pour de bon !

La mission est presque terminée. Plan de match : les recherches étant terminées pour cause de mauvais temps, on rentre. Les Planctons sont des moumounnes. Deux ou trois vagues et hop, c'est terminé...




Direction Gaspé pour disposer des toilettes chimiques en passant, puis Québec, notre terminus.

À notre arrivée, les deux bécosses chimiques, souvenir dérisoire de nos déboires passés, sont encore là sur le quai… Personne n’a eu le temps d’aller les ramasser. À moins que, notre réputation nous précédant, les administrateurs du port de Québec aient prévu le coup : «Alerte, les gars ! C'est encore eux ! Sortez les bécosses chimiques !»

14 commentaires:

Beo a dit...

T'es vraiment dûe pour nous parler de bécosses toi!

Tu parles d'une affaire... comme si une fois suffisais pas!

Sinon; je te trouve bien courageuse de prendre la mer à ce temps-ci de l'année, pour en plus tomber sur une panne AVANT de lever l'ancre!

J'espère que tes autres sorties en mer se passeront mieux!

Anonyme a dit...

Trouver les bécosses: c'est un jeu de piste.
faut pas être pressée

Anonyme a dit...

Toujours aussi succulentes tes histoires de bécosses.

A bientôt sur la terre ferme.

Perlethorens

Myricoud a dit...

encore une belle histoire de bécosses, un livre tu devrait écrire, là-dessus.

Anonyme a dit...

Comme je suis allé en peu en mer cette année, ça m'a comme fait «sentir» mieux ce sujet. Mes autres traversées par bateaux datant de plus de vingt ans... mes souvenirs étaient un peu émoussés.// Sentir dans le sens du vent marin dans la face et le sel, le mouvement de la mer, tout ça. :o)

Anonyme a dit...

On pensait à une grande aventure...et puis finalement, c'est comme un pétard mouillé! ;) Et une autre histoire de bécosse, mais c'est très drôle finalement!

coyote des neiges a dit...

Mais c'ÉTAIT une grand aventure!!! Ça parait que tu n'étais pas là, dans le local du sewage, à 03h du matin, à reconnecter la pompe en mourant de rire parce que le capitaine et le boss chantaient des chansons du style «passe partout»...

Anonyme a dit...

Ça me semble un métier qui demande pas mal de force physique en plus du quotient intellectuel.

J'en conclus que les mécaniciens de bateau, c'est pas des deux de pique :)

Anonyme a dit...

Une belle histoire "grasse" comme je les aime LOL! Oublie pas de faire un détour par ici quand tu repartiras!

coyote des neiges a dit...

Fredesk: une dame de pique à la rigueur...

Shandara : grasse, tu dis? Et encore, j'ai pas mis la photo de la bobette décomposée que j'ai trouvée dans le grillage!!!

Unknown a dit...

coucou ce sont de superbes photos
bisous nathou

Anonyme a dit...

Tordu. J'ai des crampes. Tu as le tour de raconter... surtout que je viens aussi de me taper l'histoire des sanisettes!

Anonyme a dit...

ha ben je comprend mieu ta passion pour les becosses en fait c'est ton job tu es dame pipi sur les bateaux

coyote des neiges a dit...

Hihi, si au moins j'avais un pourboire!!!