La première compagnie

Malgré que je sois perdue en pleine campagne, je me tiens au courant des nouveautés françaises par mon espion sur les lieux. C’est ainsi que j’ai su que TF1 a une nouvelle émission débile : «première compagnie». Autrement dit, ils mettent des célébrités dans un camp militaire.

Bien sûr, je ne peux regarder cette émission, mais je peux aller voir le site internet pour pouvoir déverser un peu de fiel et rendre heureux mon public, toujours à l'affût de mes montées de lait contre les émissions françaises de téléréalité.

Je me suis donc rendue sur http://1erecompagnie.tf1.fr/

Et j’ai du mérite, car la page prend énormément de temps à charger, et on nous sollicite à tout moment pour charger la dernière version de macromédiaflashplayer7. Autrement, rien ne défile, sur ce site, sauf les pubs.

Je n’irai pas me taper les vidéos, mais tout de même, je peux voir les photos. On nous invite à faire connaissance avec Magalie, infirmière. On voit sa photo : blonde, maquillée, décolletée et échevelée. On dit d’elle que : «Elle est jeune, elle est jolie, et elle porte magnifiquement bien sa blouse… Mais avant tout, Magalie est une infirmière aux compétences multiples.»

Bref, on l’a choisie pour ses gros totons. On a tout de suite aguiché une certaine catégorie de téléspectateurs.

Voyons qui d’autre on nous propose : Thierry, sous-commandant. «Regard bleu acier et tempes grisonnantes». Puis on nous mentionne ses multiples médailles gagnées au Thad, en ex-Yougoslavie et à Dijbouti. Et on ajoute que sa mission est de rester à la base et veiller à ce que les recrues fassent ce qu’on leur demande.

Ainsi malgré ses multiples médailles, il est relégué à la fonction de pantin de télévision, à faire le guignol en compagnie de célébrités pour faire un bon spectacle. On se demande ce qu’il a fait pour descendre aussi bas…

Puis il y a Suzanne, une autre infirmière, dont on dit : «Cheveux coupés courts et un éternel sourire aux lèvres : Suzanne est l’archétype de l’infirmière bonne pâte et toujours de bonne humeur.» Celle-là, on n’a pas jugé bon de la photographier avec les premiers boutons de sa blouse détachés.

Tiens, nous avons maintenant Jean-Michel, commandant. Une main de fer dans un gant de velours, voilà qui va ravir les amateurs d’humiliations infligées. Un genre de «chef» comme dans «oui, chef» mais au niveau militaire.

«Jean-Michel a ensuite formé et dirigé des hommes pour des opérations dans la jungle ou encadré des athlètes de haut niveau au bataillon de Joinville, avant de devenir chargé de mission au ministère de la défense.» Ici on voit que le ministère de la défense n’a vraiment rien à faire pour envoyer son chargé de mission faire le clown à la télé. Sa tâche? «Il assure la direction de la caserne avec sa fermeté habituelle, et a la lourde tâche de désigner chaque semaine les plus mauvaises recrues.»

Encore un qui a dû faire des actes inavouables, pour s’exposer ainsi à être discrédité et ridiculisé par le reste de sa profession…

On donne l’horaire de chaque journée (le «planning» quotidien, comme les Français disent). Ça ressemble plus à un camp de vacances qu’un camp militaire. Levée au clairon, faire les lits, petit déjeuner, puis ½ heure de sport léger le matin. Il y a une pause déjeuner de presque 2 heures, un peu d'instruction, deux heures d’exercices et, après le dîner (souper), les chants de la compagnie. Et oui, ils vont chanter!!!

Je ne vois rien de bien draconien dans tout ça.

Je crois que cette émission, qui a nécessité la collaboration du ministère de la défense, a pour but caché de recruter des jeunes dans les rangs de l’armée. Ils vont en avoir une vision «colonie de vacances», et ils vont naïvement signer pour 10 ans. «Engagez-vous, rengagez-vous» qu'ils disaient!

L’Église catholique, en manque de prêtres, pourrait s’inspirer de ce type d’émissions pour le recrutement.

Les célébrités disent la messe.
Les célébrités entendent des confessions.
Les célébrités s’enivrent au vin de messe.

Imaginez l’effet d’entraînement chez nos jeunes!!!