lundi 31 octobre 2022

L'absurdité totale du papier de toilette «Jumbo»

Ne sachant plus quoi inventer pour se démarquer, les compagnies de papier de toilette se sont mises à créer des rouleaux «jumbo». Oui, après les «doux», «doux et épais», «extra-doux», «double épaisseur», «triple épaisseur», «hypoallergène»... voici le «jumbo».


Donc le dernier coup de marketing a été de faire des rouleaux plus gros que nature (en autant que la nature d'un rouleau fut définie par la taille standard des distributeurs de papier de toilette). Cela permet d'écrire sur l'emballage «12 rouleaux = 36 rouleaux». Et l'acheteur enthousiaste va se précipiter, croyant faire une bonne affaire.



Car bien sûr, tout le monde s'entend pour dire que c'est chiant (sans jeu de mot) changer le rouleau sur le distributeur. Qu'à cela ne tienne! Si on fabrique des rouleaux plus gros, on n'aura pas à les changer aussi souvent!


Donc pendant le tiers de la vie du rouleau, on se résigne à faire frotter le papier contre le mur parce que l'espace prévu entre l'axe du distributeur et la paroi n'est pas assez grand. Alors la friction fait séparer les feuilles prématurément et on doit retirer individuellement les trois ou quatre (tout dépendant des besoins du moment) feuilles nécessaires pour ensuite les assembler avec l'épaisseur requise.



Résultat : on a un rouleau qu'on doit écraser et dont les feuilles frottent allègrement contre un mur d'une propreté douteuse. 









On pourrait aussi bricoler une cale entre le mur et la plaque de soutien du distributeur pour augmenter la distance axe-mur, mais ça détruirait l'aspect élégant du dispositif.

Pour contourner le problème, il y a aussi la solution de laisser le rouleau à portée de main, simplement sur le comptoir du lavabo, le temps d'utiliser l'excédent de papier et faire de nouveau correspondre les dimensions. 

Bien sûr, cette solution n'est pas d'un esthétisme très prononcé, quoiqu'il s'agisse d'une solution temporaire. Enfin, temporaire, disons le tiers de la vie du rouleau.

Il est vrai que ça permet de changer moins souvent le rouleau, je le concède. Et même, à force d'utiliser le rouleau hors du distributeur, on peut, pourquoi pas, s'y habituer et se passer totalement de celui-ci.

Ce qui rend par le fait même un peu caduc l'avantage principal du rouleau «jumbo» : puisqu'on n'utilise plus le distributeur, pourquoi ne pas simplement continuer à acheter des rouleaux de grandeur normale?


jeudi 31 mars 2022

Danielle Plomb, auteure à succès

 

Je suis tombée, dans un passe-livre, sur un bouquin de Danielle Steel. Influencée par l’excellente série Discussion avec mes parents  et la passion de la mère pour les romans de Danielle Cuivre, je me suis dit que ça ferait une bonne lecture de chevet.

 

Le titre est «Loving». Ils ne se sont pas cassé les couilles pour traduire, mais bon. Mettons «amour»… j’en suis encore à me demander c’est quoi le rapport avec l’histoire. Et surtout, pourquoi je l’ai lue jusqu’à la fin!!!

 

Il s’agit du parcours d’une jeune fille super riche. L’auteur ne nous laisse pas oublier une minute qu’elle est riche avec des descriptions lourdingues de sa tenue vestimentaire, de ses bijoux, etc. Elle vit avec son père, auteur célèbre mais homme très dépensier, et elle lui sert d’intendante, c'est-à-dire préparer ses réceptions, chose qu’elle exécute avec une grâce incommensurable et un goût exquis. Ah oui! Ai-je mentionné que la jeune fille est extrêmement belle, aussi? Peau laiteuse, cheveux non pas roux mais d’un délicieux auburn, grands yeux émeraude, taille fine, tous les clichés y passent. Quand elle veut savoir l’heure, elle ne regarde pas simplement sa montre. Elle regarde sa montre Dior cerclée de diamants. Ce n’est pas le son de ses pas qui résonnent sur le carrelage, c’est le son de ses escarpins griffés, d’un vert émeraude assorti à ses yeux.

 

Donc au début, elle ne fait que ça, organiser des partys somptueux à la demande de son père. Et être belle. Soudain, son père meurt. Et ô surprise, il laisse une tonne de dettes derrière lui. La pauvre Bibi se retrouve sans le sou, presque clocharde, elle doit procéder à la vente des 9 propriétés de son père un peu partout dans le monde, des 25 voitures de luxe, des tableaux de valeur… Elle ne réussit à mettre de côté que quelques bijoux et ses effets personnels.

 

Elle se retrouve alors dans une misère abjecte : elle doit déménager, elle et ses 50 maigres valises pleines de robes du soir d’un goût exquis, dans une chambre d’hôtel miteuse (pas de spa intégré).

 

Heureusement, le meilleur ami de son père, très riche, est là pour l’épauler psychologiquement. Car pas question qu’il l’aide financièrement, elle a tout de même sa fierté. C’est sûr qu’après qu’elle l’ait épousé (car en plus d’être très riche, cet ami est un beau vieux, et elle l’aiiiiiime), il est normal qu’elle reprenne la vie pour laquelle elle est née, une vie à la hauteur de sa beauté et de son goût exquis.

 

Son rêve est d’écrire une pièce de théâtre. Pas n’importe laquelle, SA pièce. L’auteur revient là-dessus pendant des années (où l’héroïne n’écrit rien mais décide de travailler dans le milieu du théâtre pour mieux s’imprégner du métier). Elle finit par tromper son vieux mari avec un comédien, qui l’a séduite par tromperie. Car l’héroïne est douce, gentille, extrêmement belle (je l'ai déjà dit?), et a de très hautes valeurs. C’est pourquoi, par souci d’honnêteté, elle divorce de son vieux mari avant d'épouser le comédien (qui ne visait qu’à obtenir un visa US). Mais elle tombe enceinte. Son nouveau mari ne veut pas de l’enfant. Elle finit par divorcer, faire une fausse couche, et enfin tenter de se suicider.

 

Après sa tentative de suicide, elle ouvre les yeux et se retrouve à l’hôpital devant un médecin (John). Elle l’épouse. Il s’avère (attention, ici, c’est complexe psychologiquement!) que John a été séduit par sa beauté, sa fragilité, et la très très dure vie qu’elle a menée. Oui, le mot «très» est répété deux fois. Ah, la misère des riches! Il décide de lui faire mener une vie normale. Elle continue à s’habiller avec goût, mais sans briller, la pauvre. Elle est pourtant subjuguée par lui, fait tout ce qu’il lui dit de faire, ne fait pas ce qu’il ne veut pas qu’elle fasse. Il entre dans une colère folle lorsqu’elle lui dit qu’elle aimerait écrire une pièce (SA pièce). Elle tombe enceinte. Elle a un bébé. Elle devient Madame au Foyer. Après sept ans, elle trouve enfin du temps pour écrire SA pièce en cachette en se disant que ce sera une surprise pour son mari.

 

Mais celui-ci, lorsqu’il l’apprend, entre dans une colère terrible (oui, une autre), divorce et lui abandonne l’enfant. Bibi se alors retrouve à NY (avec l’enfant) pour monter SA pièce. Car bien sûr, du premier coup, elle a écrit un chef d’œuvre que les éditeurs s’arrachent. Elle épouse l’éditeur.

 

Vers le milieu du livre, je me suis soudain posé la question : mais, serait-ce une parodie et j’ai pris ça au premier degré??? Pourtant non…

 

Au bout d’un bonheur d’un an sans taches, son 4e mari meurt. Drame. Elle écrit une seconde pièce de théâtre, qui a autant de succès que la première et même plus. Jeune veuve, elle raconte sa vie à un ancien ami du 4e mari, qu'elle vient de rencontrer. On est rendu à la fin du livre.


Avec une habileté diabolique, Danielle Steel nous laisse imaginer la suite.

 

Ça donne envie, non?



dimanche 6 mars 2022

Les comédies romantiques

 14e chronique de l’influenceuse

 

 

Depuis peu, mon forfait télé m’offre une chaîne exclusivement réservée aux comédies romantiques, sans que je ne l’aie demandé ni que je n’aie à la payer. C’est super, parce que j’aime écouter des comédies romantiques. Oui, oui, je suis une adepte : j’écoute avec plaisir les comédies romantiques, ce qui ne signifie pas que je considère que le couple est une forme de vie désirable.

 

Doit-on croire à la magie pour lire Harry Potter? N’y a-t-il que les catholiques convaincus qui regardent «Les anges du bonheur?» Faut-il croire au Père Noël pour avoir du plaisir à recevoir un cadeau? Et les contes de fées? Et la science-fiction? Bon, alors laissez-moi tranquille, faut pas faire chier mémé. Et oser avouer que j’aime les comédies romantiques me donne tout de même de la crédibilité quand je dis que je déteste la téléréalité. Si je suis capable d’assumer l’un, je serais capable d’assumer l’autre.

 

J’avais déjà un peu parlé ici des comédies romantiques à saveur de Noël . J’y avais analysé des incohérences et quelques points communs qui font d’un film de Noël la quétainerie suprême. Attardons-nous maintenant sur l’aspect purement «romantique» des comédies cucul.

 

 

Il y a la scène classique de la pâtisserie : l’héroïne fait une tarte (ou un gâteau), et elle a de la farine sur le nez. Vu que c’est mignon (ce qui est un mot-clé dans toute bonne comédie sentimentale qui se respecte), le héros va le lui essuyer puis s’en suivra une bataille de farine où les protagonistes rient aux éclats. C’est l’équivalent d’été de la fameuse bataille de boules de neige des films de Noël (où les protagonistes rient aussi aux éclats).

 

 

Voici un autre classique : au début du film, l’héroïne est déjà fiancée. Il est plutôt bel homme, pour égarer les soupçons de l’auditrice moyenne. Mais l’auditrice experte (que je me targue d’être) connait les canevas habituels, et sait que le fiancé du début est rarement le même que le marié de la fin. Je vous donne un indice : il ne rit jamais aux éclats avec l’héroïne. Et peu à peu, dans le film, le fiancé initial fait preuve de mépris, ou simplement d’indifférence. Il ne correspond plus à l’Idéal Chevaleresque que le film romantique veut projeter. C’est le moment où l’auditrice moyenne se demande ce qu’il fait là et commence à douter du bien fondé du concept de mariage.

 

 

Mon moment préféré dans les comédies romantiques est justement lorsque l’héroïne largue son fiancé initial. Celui-ci, s’il est quand même un peu gentil, se trouve rapidement une autre fille plus adaptée à son caractère, et s’il est chiant, on se régale de son incompréhension et de sa déconfiture. C’est jouissif. Pendant ce temps, l’héroïne s’est trouvé un autre homme, alors l’auditrice moyenne, un moment déboussolée, est rassurée, car l’héroïne ne finira pas dans la… SOLITUDE MAUDITE!!! Non! Elle ne saute pas dans le vide abyssal du célibat, elle ne fait que passer d’un fiancé à un autre, assez rapidement. Ouf, elle est sauvée par le nouveau fiancé qui apparait de nulle part et qui lui convient parfaitement, même (et surtout) si, au début, leur relation n’était pas de tout repos.

 

 

Au passage, la meilleure amie de l’héroïne se trouve aussi un tchum. C’est un bonus. Pour montrer que l’amour est universel. Et inclusif, puisque souvent la meilleure amie est noire. Ou asiatique. Ou handicapée. (Tout sauf lesbienne, on n'en est pas encore là dans l'inclusion semble-t-il). L’honneur est sauf et le bonheur de tous est alors assuré, sauf celui du fiancé initial. S’il était vraiment vilain, il n’aura eu que ce qu’il mérite : la terrrrrrible solitude.

 

 

Le chanceux.

 

 

dimanche 27 février 2022

La solitude en pandémie

(ou… Je vais en Ville!)


13e chronique de l'influenceuse

 

  • Youppi! J’ai un petit rhume! Quel prétexte idéal pour m’isoler pour 14 jours supplémentaires! Écrivis-je un jour à Amie-qui-me-connais-bien, dans mon courriel journalier (oui, car pour s’assurer que je suis toujours vivante, elle m’oblige à me rapporter à tous les matins par courriel).
  • As-tu vraiment besoin d’un prétexte? Me demanda-t-elle…
  • Non. Répondis-je.

 

Car le solitaire s’accommode très bien de la pandémie, à condition de ne pas attraper le Covid, bien sûr. Durant des années, le mois de janvier était pour moi sujet à quelques craintes. Cela signifiait la rentrée au bureau pour la première fois de l’année, donc j’avais «droit» aux souhaits de bonne année que je m’efforçais de rendre du mieux que je pouvais, ainsi qu'aux bisous traditionnels de collègues de bonne volonté. On finit par s’adapter, au fil des ans, on se dit que ce n’est qu’un mauvais moment à passer, on se soumet passivement aux effusions annuelles. Mais on a hâte au 23 janvier, là où tout le monde y a passé. Ou bien oublie qu’on y a échappé.

 

Étant en semi-retraite, il se trouve que je ne travaille pas ces temps-ci. Je fais donc ce que j’ai toujours fait dans mes périodes d’inactivité, pandémie ou pas : je m’enterre dans ma bulle, bulle qui s’étend dans un rayon de 750 mètres autour de ma maison (sauf pour ce voisin qui est venu récemment s’installer à 125 mètres de chez moi, mais heureusement, il ne sort pas souvent de chez lui). Escortée de ma meute de chien féroce (Peluche, viens mon toutou!), je parcours mon territoire jalousement. Telle une impératrice, je salue de la main, avec toute la superbe que je peux arborer, ceux qui passent en auto dans mon rang; ceux qui habitent encore plus creux que moi. Ou les livreurs. Ou le camion de poubelles. Je ne suis pas élitiste.

 

Mais enfin, puisqu’il faut bien manger, je me suis décidée à aller en ville. Amie-qui-me-connait-bien, à qui j’ai envoyé un courriel pour lui dire, m’a répondu «À -24°C? Tu es courageuse!». Ah merde, que je me suis dit, j’ai raté une autre bonne occasion de procrastiner. Mais puisque j’étais déjà sur ma lancée (quel dommage), j'y suis allée. Et aussi parce que j’étais un peu tannée de manger du spag.

 

Est-ce parce que ça faisait longtemps que je n’avais pas vu personne? Il m’a semblé que tous ceux que j’ai rencontrés (vendeurs, autres clients, collègues, passants dans la rue) étaient très avenants. Peut être aussi que le port du masque oblige à exagérer les marques d’amabilité: puisqu’on ne peut voir, au travers du masque, un sourire poli, il faut sourire des yeux et en plus verbaliser les politesses «Mais je vous en prie…», «Passez une bonne journée…» etc. L’amabilité étant contagieuse, nous obtenons, dans notre petite ville, un environnement civil et raffiné où il fait bon vivre en société… C’est sûr qu’on n’est pas à Ottawa, par contre.

 

Finalement, les autres ne sont pas si pires que ça. À petite dose. Je suis rentrée chez moi avec assez d’épicerie pour tenir jusqu’à la fonte des neiges.


 

jeudi 17 février 2022

Renversons la vapeur

 

12e chronique de l'influenceuse

(La revanche des tu-seuls)

 

N’oublions pas que mon créneau d’influenceuse est la solitude. Alors pour tous mes gentils détracteurs qui se sentent obligés de défendre leur position de couple, de sociétaires, de grégaires, il me fait plaisir de recevoir vos doléances et vos arguments pitoyables. Pour une fois, vous vous trouvez dans la situation habituelle des solitaires, qui se sentent attaqués dans leur identité, incompris, et qui finissent par adopter, de guerre lasse, le point de vue de la majorité qui leur matraque sans arrêt combien ils sont malheureux… Ou s’ils sont heureux, c’est qu’ils font semblant.

 

Car tout converge de façon à ce qu’on se sente triste lorsqu’on est seul. Je parle d’être seul en général. À force de se faire marteler (que ce soit par les chansons à la radio, par les comédies romantiques qui «finissent bien», ou par notre entourage «bienveillant») qu’on doit éviter la solitude à tout prix, une angoisse se forme dès qu’on se retrouve seul. Par la contagion de la phobie collective, on se sent obligé de se sentir misérable.

 

Virons ça à l’envers. Dans un monde d’ermites, un petit troupeau de grégaires existe. Ils se font naturellement harceler :

 

Il y a les gens qui ne comprennent pas le choix (si c'est bien un choix) de ce troupeau :

  • Tu dois en avoir marre d’être toujours entouré?
  • À la longue, ça doit peser, se sentir toujours observé?
  • Mais comment peux-tu accepter de faire des… compromis? (ce dernier mot à prononcer sur un ton dégoûté)

 

Ils se font déclarer, d’un air sentencieux :

  • Il ne faut pas confondre le «fun» avec le bonheur…

 

Pour donner de l’espoir à ces pauvres grégaires :

  • Ne t’en fais pas, un jour ton conjoint va bien finir par décoller…

 

Et, pour inciter ces personnes à se conformer à la norme :

  • Pense à tous ces êtres dont l’absence te réjouirait!

 

Mais on vit en société. Je suis du mauvais côté de la barrière…



lundi 14 février 2022

Spécial Saint-Valentin

 11e chronique de l’influenceuse

 

Messieurs, s’il y a quelque chose de plus pénible que de réfléchir à un cadeau de Saint-Valentin et de le préparer, c’est d’attendre que son tchum arrive avec un cadeau de Saint-Valentin. Que ce soit une sortie dans un resto bondé (bin oui, toé, le 14 février) ou bien un bouquet de roses (ou du moins ce qui reste chez les fleuristes, un 14 février), ou du chocolat en forme de cœur emballé dans du papier alu rouge (qui sera en spécial chez Jean Croûteux, la pharmacie où on trouve de tout même un ami, à partir du 15 février), tous les médias s’assurent que personne n’oublie la date fatidique.

 

Eh oui, la tradition exige encore que ce soit le monsieur qui offre un cadeau à la madame. Cette fête perpétue, sous couvert de romantisme et d’amour, l’idée de l’homme pourvoyeur de bonheur et de la femme qui attend passivement. Les attentes sont telles que même si le couple a décidé d’un commun accord de ne rien faire, la femme se sentira vaguement déçue et l’homme vaguement coupable.

 

Le pire est que cette fête revient tous les ans. Si, une année, une Saint-Valentin a été fêtée de façon extraordinaire, on ne pourra faire moins l’année suivante sous peine de penser que le couple bat de l’aile. Et quand on pense qu’il pourrait y avoir 70 Saint-Valentins dans la vie d’un couple (oui, l’enfer, c’est long!), on a intérêt à commencer doucement.

 

La célibataire, elle, ne s’attend à rien. Elle regarde passer les pubs avec un ricanement intérieur. Pour peu que personne ne vienne lui remettre à la figure son statut de «pauvre solitaire qui doit tellement être malheureuse un 14 février», quand on y pense, elle est certainement beaucoup plus sereine que celle qui se demande si l’amoureux va y penser, s’il va faire mieux que l’an dernier, ou comment elle devrait interpréter le cadeau ou la surprise.

 

Pour la célibataire qui aime le chocolat aux cerises, il sera en spécial dès le lendemain chez Jean Croûteux, là où on trouve de tout sauf, dieu merci, un amant.

 

On n’est jamais si bien servi que par soi-même.

 

 

jeudi 10 février 2022

«Prendre soin de soi»

10e chronique de l’influenceuse

 

J'ai reçu une pub provenant d’une pharmacie (je parle ici de ces pharmacies québécoises où on trouve de tout, même un ami), avec, en gros titre «Cet hiver, prenez soin de vous». Ooooh, quelle bonne idée! J’ai tout de suite pensé à quelque chose de douillet dans lequel me vautrer, qui va augmenter mon degré de confort… Je me voyais en pyjama, tasse de chocolat chaud à la main, soignant un rhume éventuel avec un cachet de vitamine C… Alléchée par la perspective, je me suis empressée d’ouvrir ce courriel…

 

… pour m’apercevoir qu’on me conseille un rouge à lèvres qui va me donner des lèvres pulpeuses ou bien des faux-cils révolutionnaires qui tiennent magnétiquement (je n’invente rien!) et qui vont me donner l’impression d’avoir des araignées autour des yeux. Quelle déception. Prendre soin de soi, ou de son apparence? On a encore bien du chemin à faire…

 

Je vote pour le laisser-aller. Mais la personne qui se «laisse aller» suscite de la pitié. «Elle qui prenait tellement soin d’elle, qui était toujours tirée à quatre épingles, voilà maintenant qu’elle sort sans même se maquiller. La déchéance». La société imagine ainsi, avec tristesse, ce qui se passe dans la tête d’une personne qui se laisse aller… elle vieillit… elle a lâché prise sur la vie…

 

Et si c’était le contraire? Arrêtons de ne voir que l’extérieur, entrons à l’intérieur : oui, le corps exulte! On pense à soi, dans le vrai sens du terme. Maquillage? Talons hauts? Pffft! Ce qui se passe dans notre tête, pour vrai? Tout simplement qu’on s’en fout!

 

Et nous pouvons enfin chanter à pleins poumons : libérééééée, délivrééééée…

 

 

 

Mais pourquoi les compagnies de produits de beauté ne se précipitent-elles pas pour me commanditer? Je dois avouer que ma préférée reste la fameuse crème miracle, celle-là :

 L-100-K-Lisse 



lundi 7 février 2022

Le couple

9e chronique de l’influenceuse

 

Puisque la solitude est souvent associée au célibat, je crois que le moment est venu de parler du couple.

 

Le couple : LE grand sujet de la solitude, que j’ai diplomatiquement évité dans mes précédentes chroniques, parce que notre société a érigé l’Amour comme valeur suprême. Si je n’avais pas soigneusement préparé le terrain, je me serais fait blaster dans les commentaires (et j’aurais perdu mes commanditaires de rouge à lèvres).

 

Loin de moi l’intention de faire divorcer tous mes fans mariés, si vous êtes heureux, ou que vous en êtes persuadés, tant mieux pour vous. Je m’adresse surtout aux tu-seuls qui se font culpabiliser sans arrêt (pis, quand est-ce que tu te trouves un tchum/une blonde?) et qui se sentent obligés de faire semblant de faire semblant de s’en foutre (attention, c’est du 3e degré!). Autrement dit, ils s’en foutent réellement dans le fond de leur être, mais ils doivent se conformer à ce qui est attendu d’eux : avoir l’air de se forcer à faire bonne figure, comme on le voit dans les comédies romantiques, au début du film. L’héroïne prétend être trop occupée pour se trouver un mec, mais tous les autres comédiens (et l’audience) savent ce qui est bon pour elle, c’est-à-dire se trouver un mec. Je reviendrai sur le sujet des comédies romantiques, j’en ai beaucoup à dire sur le sujet aussi.

 

Bref, être en couple combine tous les désavantages de la solitude (il n'y en a pas beaucoup), sans aucun des avantages (et dieu sait qu'il y en a!).

 

Il est tellement admis que le couple est l’idéal auquel il faut aspirer (un peu comme la maternité pour les femmes, mais ceci est une autre question qui devra faire l’objet d’une chronique en elle-même, je suis intarissable sur le sujet, en fait je suis intarissable sur tous les sujets), que personne ne nous croit quand on dit qu’on est célibataire par choix.

 

Un vieux garçon, à la rigueur, ça passe. Un clin d’œil salace permet de convaincre l’interlocuteur qu’il a une vie «bien remplie». Et ici, le «bien remplie» est accompagné du geste ostensible de guillemets avec les doigts qui signifie «Je fourre tout le temps». Et les gens lui foutent la paix.

 

La célibataire, par contre, a doit à tous les arguments pour la convaincre qu’elle est malheureuse.

  • Tu n’as pas encore trouvé le bon… (le bon quoi???)
  • Mais comment peux-tu vivre sans Amour?
  • Pis, quand est-ce que tu nous présentes ton tchum?
  • T’en fais pas (mais je ne m’en fais pas du tout), un jour ton prince viendra…

Et lorsque la St-Valentin arrive, tous les médias (ainsi que la circulaire Jean Coutu) sont là pour rappeler que ce n’est pas normal d’être tout seul. Impossible de trouver du chocolat sans qu’il soit emballé de rouge et en forme de cœur.

 

Et pourtant… On connait tous un couple solide, amoureux, ensemble depuis longtemps, qui transpire l’harmonie et la guimauve… On se dit que c’est notre modèle, que c’est l’archétype du bonheur conjugal. C’est LE couple qui nous donne espoir, qui nous fait croire en l’Amour… et combien de fois n’avons-nous pas été ébranlé par la soudaine réalisation que tout n’est pas rose dans ce couple qu’on considère «idéal»?

 

Ce qui vient brouiller les cartes, c’est qu’il est admis que pour être normal, il faut avoir une vie sexuelle «saine». Saine dans le sens qu’il faut fourrer, mettons, une fois par semaine minimum. Mais les hormones, ce n’est pas tout dans la vie. Il y a aussi la criss de paix. Quand on est célibataire, qui vient nous déranger le matin quand on n’a pas envie de parler/baiser/se réveiller? Avouez, moitiés de couple, que très souvent vous avez envie de dire «Oh, mais décolle!» mais que vous retenez votre réplique agacée parce que… vous êtes en couple.

 

Comme célibataire, on n’a de compromis à faire qu’avec soi-même. C’est ça, le comble du luxe!

  

jeudi 3 février 2022

Aidan ou Mister Big

 8e chronique de l’influenceuse

 

Avant de parler du couple comme tel, inspirons-nous de Sex and the City  pour parler du vif débat qui fait rage (oui, encore de nos jours même si la série est terminée depuis longtemps) entre les tenants d’Aidan et ceux de Mister Big (les deux prétendants très différents de Carrie, l’un des personnages principaux).


Non, je n’ai jamais écouté la série Sex and the City. Peut-être que vous non plus. Disons que c’était une série qui se voulait féministe, hyper populaire chez nos voisins du sud, qui mettait en scène quatre trentenaires célibataires au début des années 2000, à New-York.


On va encore dire que je parle de ce que je ne connais pas, c’est vrai, mais cette fois, je ne me cache pas que je vais parler de ce dont j’ai entendu parler. La femme qui vu la femme qui a vu l’ourse. Je ne parlerai donc pas de la série, mais d’un point bien précis. Comment en suis-je arrivée à être une telle sommité en matière de sexe et de cité? Grâce à India Desjardins .


Dans son livre Mister Big, India Desjardins cite Michael Patrick King (le producteur, réalisateur et/ou scénariste de la dite série, que je n’ai pas écoutée) qui disait, en entrevue «If I talk to a woman for more than five minutes I can telle you exactly whether she’s a Aidan girl or a Mr Big girl. Aidans girls are more interested in nurturing relationships and building a nest, while Mr Big girls are more about show and having fun» (Cliquez pour avoir la version complète de l'entrevue).


India Desjardins donne deux raisons pour lesquelles cette citation la dérange : premièrement parce que le monsieur catégorise les femmes en cinq minutes selon le type d’hommes qui leur plait, et deuxièmement à cause du fait qu’il leur accole une étiquette du nom d’un personnage masculin.


Je peux ajouter plein d’autres raisons pour lesquelles la citation me dérange : déjà, se permettre de catégoriser les femmes (sous-entendu toutes les femmes), c’est d’une prétention sans bornes. Ensuite, de prétendre pouvoir le faire en l’espace de cinq minutes, ça dépasse l’entendement. Même chose pour tous les êtres humains, fussent-ils hommes, d’ailleurs. Au-delà du libellé des étiquettes, il y a le nombre d’étiquettes. Il y en a deux. Deux routes à prendre. Rien entre les deux. Mais encore au-delà du nom, au-delà du nombre, c’est le choix des étiquettes qui me dérange : la sécurité ou le fun (par «fun» entendez «sexe»). La dichotomie de la maman et la putain. On n’est pas sorties du bois.


Bref, tout me dérange dans les trois lignes citées. Je ne prendrai pas la peine de commenter toute l’entrevue, je risque de péter ma fuse et de perdre le fil de mon mandat d’influenceuse.


Donc, bien que n’ayant visionné ni la série ni les deux films qui ont suivi, grâce à l’essai de Madame Desjardins, j’ai compris que la seule option de Carrie (un des personnages centraux) est de décider avec qui elle va finir (notez que le terme «finir» n’a pas été choisi au hasard).


Le débat entre Aidan et Mister Big se résume en réalité à : «Veux-tu une relation plate ou une relation toxique ?» Ne serait-ce pas un faux débat ? N’y a-t-il pas d’autres modèles de relation ? Mais… plus important encore, il faudrait s’interroger en premier à «Veux-tu une relation ?», tout simplement.


Et si la réponse était «Non merci» ?

 

 

(Vu la popularité de la série, j’ai fait exprès de mettre un titre putaclic pour attirer plus de lecteurs.)

 

 

lundi 31 janvier 2022

S'habiller, quand on est seul

 7e chronique de l’influenceuse

 

Si on est seul, mais vraiment seul, c'est-à-dire qu’on ne prévoit ni sortir ni recevoir (ces jours bénis!), s’habiller prend sa plus simple expression. Non, on ne reste pas en pyjama toute la journée, bien que ce soit tentant. Sinon, on perd le plaisir de se glisser, le soir venu, dans notre pyjama, le vrai, celui avec des nounours blancs imprimés sur fond rose bonbon.

 

On doit donc impérativement s’habiller, c'est-à-dire mettre son pyjama de jour. Mou, chaud, confortable. Qui est là pour nous juger? Et d’ailleurs, nous juger sur quelle base?

 

Méfions-nous des premières impressions qu’on veut donner, au bureau ou ailleurs. Trop de préparation crée des attentes irréalistes. Il est important, lorsqu’on arrive dans un nouveau milieu, de se faire sa propre niche. Arriver maquillée, talon-hautée et petit-tailleurée le premier jour peut certes impressionner l’entourage, mais cela oblige à rester chaque jour à la hauteur. On devient captif de l’image projetée.

 

Une collègue de bureau (maquillée, talon-hautée et petit-tailleurée depuis vingt ans) m’a déjà dit, me regardant avec envie : «Tu es chanceuse, toi, tu peux t’habiller confortable». S’il n’y avait pas eu ce regard visiblement envieux, ça aurait pu être un complimarde. Mais elle était si ouvertement admirative que je me suis rengorgée intérieurement, tout en lui donnant ce conseil paternaliste «Mais qu’est-ce que t’empêche de faire pareil?» C’est là qu’elle m’a dévoilé que, prisonnière de son image, personne ne comprendrait que du jour au lendemain elle se mette à porter running-chous, leggings et coton ouaté. Quant à moi, puisque dès le premier jour on m’avait classée dans les guenillous, j’ai pu me vautrer en toute quiétude dans les délices du mou et du confortable.

 

On devient tous prisonniers d’une image. Il faut simplement choisir soigneusement notre prison.

 

 

 

Oui, pour l’instant, je parle de cuisine, de ménage, de vêtements. Des petites choses superficielles de la vie qui ne révolutionnent pas le monde. Mais ce sera pour mieux, un peu plus tard, frapper un grand coup et dévoiler à la face du monde l’immense complot des grégaires. Quand je rentrerai dans votre intimité profonde et que je remettrai en question votre couple, ça va faire mal!

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Mais pourquoi les grandes marques de la mode ne se précipitent-elles pas pour me commanditer???



jeudi 27 janvier 2022

Faire la cuisine en solitaire

 6e chronique de l’influenceuse

 

Ne nous le cachons pas : cuisiner est une corvée. Sauf quand on va manger ce qu’on a préparé, ce qui est généralement le cas lorsqu’on est seul.

 

La solitude permet de petites fantaisies, telles se faire un hot-dog à Noël, manger un bol de céréales pour souper, mettre du basilic dans sa salade de tomates même si un Chéri éventuel n’aime pas le basilic… Il est possible de manger devant la télé, ou en complétant sa grille de futoshiki, ou en lisant… Pas besoin de faire la conversation.

 

Est-ce que la personne seule mange toujours la même chose? Ce qui est merveilleux dans cet aspect de la question est que la réponse est : si elle veut!

 

Est-on obligé de faire de toutes petites portions, multipliant ainsi la corvée de cuisine? Non! Car le congélateur est le meilleur ami de la personne solitaire. Avec cet appareil, rien n’empêche d’acheter des cuisses de poulet en spécial en format familial et d’en congeler par paquet de 2 ou 3 dans des sacs de plastique (les poches de lait font des sacs de congélation parfaits). Le même raisonnement s’applique pour les paquets de steak haché en spécial format familial. Vingt boulettes préparées d’avance avec le gugusse en cylindre pour taper des boulettes de steak haché toutes égales et les mettre au congélateur, steak encore à l’intérieur, pas capable de l’enlever, légèrement abimé parce que colissé sur le mur (Pérusse, sors de ce corps!) nous permettent vingt repas à des dates choisies. Si on veut manger du hamburger 3 jours de suite, libre à nous. Sinon, on dégèle boulette par boulette, selon l’inspiration du moment.

 

Le net regorge de sites avec des recettes faciles pour célibataires, des sites pour que les nuls en cuisine puissent aussi manger d’une façon gastronome. J’en donne pour exemple le très couru poêle au nez qui est, avouons-le, mon propre blogue de cuisine (si personne ne se précipite pour me commanditer, je peux bien me commanditer moi-même).

 

En fait, le seul désavantage que je vois à manger tout seul, c’est qu’il n’y a personne pour dire «Ooooh c’est don bin beauuuuuu… Ça a don bin l’air boooooooon… Oussé que t’as pris tes belles ptites napkiiiins…». Et pour y remédier, il semble que plusieurs personnes ont trouvé la solution en postant leur repas sur les réseaux sociaux. Pourquoi pas? J’ai bien posté mon hot dog de Noël, moi…

 

 

 

Avec toutes mes superbes chroniques, pourquoi Ricardo (au Québec) ou le Chef Simon (en France) ne se précipitent-ils pas pour me commanditer??? Ou même Mercotte, pourquoi pas? (quoique je n’ai pas à me plaindre, je suis référencée ici par la Grande Mercotte en personne!)

 

lundi 24 janvier 2022

Le déni

 5e chronique de l’influenceuse

(Quand les autres te disent ce que tu ressens...)


La solitude est associée à être malheureux. À un tel point, que ceux qui sont malheureux sans être solitaires se sentent obligés de «tricher» et associer leur malheur à de la solitude. Ils prétendent alors qu'ils sont «seuls dans la foule» ou qu'ils vivent une «solitude à deux»… Comme si la grégarité était un gage de bonheur. Quelqu’un, quelque part, a décrété que l’homme est un animal social. Toute dérogation à cette règle est une hérésie.

 

Les arguments ne manquent pas de la part des fidèles chiens de berger qui se donnent pour mission de rentrer tout le monde dans le troupeau :

  • Tu dois t’ennuyer, toute seule… (bin non, je ne m’ennuie pas)
  • On en reparlera dans quelques années… (ça fait plusieurs années que je me la fait dire, celle-là)
  • Tu es bien toute seule? Mais il ne faut pas confondre être bien et être heureux! (et si moi, ça me rend heureuse, d’être bien?)
  • Mais non, tu ne peux pas être heureuse… Tu essaies de te convaincre, mais tu n’es pas heureuse.

 

Et voilà! À court d’arguments, les interlocuteurs tentent de convaincre la personne seule qu’elle n’est PAS heureuse. Au besoin, ils tordent la définition du bonheur pour qu’elle corresponde à la situation convenue dans la société et affirment sans équivoque à la personne seule qu’elle vit un drame, ce qui oblige les solitaires à fournir le fardeau de la preuve du contraire.


Sauf que les solitaires, par définition, n'en ont rien à foutre de l'opinion des autres. Ce qui renforce l'opinion générale que la solitude, c'est triste. Moi, je me dévoue pour les autres, je suis l'influenceuse qui va réunir tous les solitaires du monde.


C'est juste dommage que les solitaires n'en ont rien à foutre d'être réunis...





 

jeudi 20 janvier 2022

Parler tout seul

 4e chronique de l’influenceuse


Je veux ici démystifier l’idée qu’il n’y a que les fous qui parlent tous seuls. D’abord, il est un fait avéré que plein de gens vivent seuls, volontairement ou pas. Maintenant, imaginez quelqu’un qui vit seul passer plusieurs jours sans ouvrir la bouche. Est-ce que «Ayoye cibole!» fait partie de la catégorie «parler tout seul», lorsqu’on se cogne le gros orteil sur une patte de table? Certains diront que non, mais dans ce cas, pourquoi prendre la peine de prononcer des mots reconnus de la langue française (ou pas, mais c’est un autre débat) pour exprimer notre douleur? Pourquoi ne pas se contenter d’un borborygme inarticulé?

 

Autre exemple : le soleil se lève sur les montagnes, inondant d’une lueur de feu les collines au travers d’un ruban de petits nuages rosés… «Wow! C’est don bin beau!». Non, il suffirait d’exprimer ses sentiments avec un «EUUUUAAARRRHHHHHEUUUU» puisque personne n’est témoin de notre admiration. Mais non. Ces onomatopées sans queue ni tête rapprocheraient l’Homme de la Bête. Les sentiments nobles sont faits pour être exprimés de façon articulée. Mais si on le fait, on parle tout seul, donc on est fou. Et à la limite, rien ne devrait passer les cordes vocales, qui devraient rester de marbre devant un magnifique tableau. Illogique.

 

Il y a bien la solution d’avoir un animal de compagnie à qui on s’adresse (à la rigueur un poisson rouge peut même faire l’affaire). Dès qu’on se rend compte qu’on est en train de parler tout seul, on peut terminer notre phrase en prenant l’animal à témoin : «Pas vrai, Peluchon?» (ou Fido, ou Médor, ou Minet…). Bien que rallongeant le péché de «parler tout seul», ça justifie à nos propres yeux le long soliloque qu’on vient de faire. Tout est là : à nos propres yeux. Car puisqu’on est seul, personne d’autre n’a pu s’apercevoir qu’on vient de parler seul, donc à quoi bon se justifier? C'est parce que cet interdit est tellement ancré en nous qu'on se sent tout honteux de «parler tout seul».


De là à dire qu’il n’y a que les fous qui vivent tous seuls, il n’y a qu’un pas. Ça fait partie du complot pour nous obliger à vivre en société! Non! Parler tout seul est normal! Ami lecteur qui lisez ceci, révoltez vous! Où que vous soyez en train de lire ma chronique, dites haut et fort : «JE SUIS NORMAL!»


À lundi prochain pour ma prochaine chronique.

 

lundi 17 janvier 2022

Le ménage

3e chronique de l'influenceuse


Un autre avantage à vivre seul, c’est la gestion du ménage. Comme tout le monde le sait, le partage des tâches n’est pas encore chose acquise. Trop souvent, la responsabilité du ménage est implicitement le fait du conjoint de sexe féminin. Et si le conjoint masculin a mis la main à la pâte, c’est parce que la conjointe lui a demandé de le faire. Il va d'ailleurs s'en vanter pendant une semaine pour montrer comment il est d'avant garde.


Le seuil de tolérance au désordre n’est pas le même pour tous (mon opinion personnelle étant que passé un certain point, la poussière atteint un seuil de saturation au-delà duquel rien ne peut plus s’accumuler, du moins rien qui ne fasse une grosse différence). Il peut être irritant pour le conjoint propret de voir le conjoint traîneux laisser ses traîneries. Comme il peut être irritant pour le conjoint traîneux de voir le conjoint propret passer l’aspirateur derrière soi, en tentant de nous faire sentir coupable de ne pas l’avoir fait nous-même (non pas de S à «même» car c’est au singulier : en effet, je me nounoie).


Qui a raison, qui a tort? Même si ma sympathie va à la personne traîneuse, il reste que tous deux ont raison. Le problème vient du fait qu’ils sont ensemble. La personne seule vit très bien avec ses petites manies et est responsable de son ménage (désordre). Quand ça dépasse son seuil de tolérance, elle sait quoi faire.

 

Pour la solitaire traineuse, la phrase passe-partout «Excusez le désordre» permet de laisser croire aux éventuels visiteurs qu’habituellement, le ménage est fait mieux que ça. Qui est là pour la contredire? Il existe des variantes : «Ne regardez pas le ménage», «Je n’ai pas eu le temps de ranger», «Oh je suis honteuse» (même si cette dernière affirmation n’est pas vraie, ça parait toujours bien).

 

Ceux qui rigolent en lisant ceci, bienvenue chez moi! Quant aux autres, ceux qui sont horrifiés, bienvenue aussi, mais… scusez le désordre!